Souveraineté alimentaire en Euskal Herria

Crise écologique et économique obligeant,
la notion de souveraineté alimentaire
est plus que jamais au coeur
des débats internationaux et locaux. Alors
que le spectre des émeutes de la faim est à
nouveau sur le devant de la scène, que la crise
économique et sociale s’accentue, il
semble important de revenir aux principales
bases qui permettent d’assurer en partie la
souveraineté alimentaire sur un territoire. Le
foncier, l’eau, les semences, la présence de
production animale,(pour la matière organique),
la diversité de la production, les circuits
courts en sont les principales
données.“Manger est un souci quotidien. Hier
comme aujourd’hui, tout groupe humain, s’il
ne veut pas disparaître, doit s’organiser pour
subvenir à ses besoins alimentaires vitaux.
Ce qui était vrai il y a quelques millénaires le
restera demain”. Or le problème réside entre
autres, dans la privatisation, dans la main mise
par des multinationales sur la terre, l’eau,
les semences, la génétique mais aussi dans
le libéralisme économique. Pire, ces groupes
sont très actifs, font du « lobbying » au niveau
des plus hautes instances politiques européennes
et mondiales. Cela engendre que
manger correctement, développer une autonomie
alimentaire, réguler des systèmes alimentaires
et économiques par des
mécanismes publics devient quasi impossible.
La vie devient une lutte. L’alternative
passe par une relocalisation des systèmes et
une adaptation régionale des politiques européennes
et nationales.
Le foncier
Au niveau mondial, 200 millions d’ha, de
terres arables vendues ou louées ces dix dernières
années au détriment des populations
locales. C’est une véritable ruée orchestrée
par des multinationales ou des pays comme
la Chine ou autres. Exemple, le Kenya a signé
en 2009 un accord qui prévoit la cession
de 40 000 hectares de terres agricoles au
Quatar. Le paiement de la dette des pays
pauvres passerait-il par la vente définitive de
la terre? Disposer du foncier devient un enjeu
stratégique. Gérer le foncier de manière publique
devient un impératif démocratique. De
la FAO, aux groupes de paysans de par le
monde, de nombreuses résolutions0 et luttes
pointent aujourd’hui cette nécessité.
Autre dévoreur de foncier, la perte de la vocation
agricole de ce dernier. En Ipar Euskal
Herria même, plus de 1 000 ha de terre agricole
(équivalent de 20 à 30 fermes) par an
sont perdus du fait d’une urbanisation non
maîtrisée, de constructions de logements ou
d’activités peu réfléchies.
Il n’y aura pas de souveraineté alimentaire ou
de produire local sans maîtrise du foncier,
sans politique globale d’aménagement du territoire.
L’eau
Pas de vie sans eau, c’est bien connu! Et
pourtant l’accès à de l’eau potable devient un
enjeu majeur sur le plan mondial. Chiffre effrayant:
1,2 milliards d’être humains n’ont pas
accès à l’eau et 2 milliards n’ont pas de système
d’assainissement L’eau est devenue la
principale source de conflit avant même le
pétrole. « Empêcher les Palestiniens d’accéder
à l’eau est une règle intangible de l’armée
d’occupation israélienne depuis la première
intifada. Au plan international, l’ONU aborde
fréquemment la question de l’eau et depuis
Mme Albright, il n’y a pas eu un secrétaire
d’État aux États-Unis qui n’ait eu une visée
stratégique de l’eau ». Nous voilà rassuré. Les
usages sur l’utilisation de l’eau sont de plus
en plus déséquilibrés. Le tourisme est le principal
consommateur d’eau. « En Tunisie, le
Nord est arrosé alors que le Sud et le centre
sont secs. Le pouvoir central à Tunis met en
oeuvre une gestion de l’eau qui permet de la
transporter du nord, vers les zones touristiques
au sud ». Quantité et qualité d’eau sont
aussi liés. Or, « les menaces sont lourdes sur
les ressources en eau douce: 19 millions de
produits chimiques recensés en1998. 70 000
à 100 000 d’entre eux polluent les eaux de la
planète. Selon l’Ifen (Institut français de l’environnement),
97 % des points d’observation
de l’eau de surface montrent une présence
vraisemblable de pesticides. En ce qui
concerne les eaux souterraines 48% des
points d’observation sont probablement pollués
et 13% le sont certainement. Les conséquences
sont nombreuses et quelques cas
doivent nous amener à agir : grenouilles à 5
pattes, cancers de la peau chez l’homme liés
à la présence d’arsenic..) ».
Pourtant les alternatives existent. A Munich
en Allemagne, la conversion de tous les agriculteurs
à la bio revient à la collectivité à
moins de 1 cts/m3 d’eau alors que la dépolution
de l’eau en France coûte plus de
70cts/m3 d’eau. L’agriculture biologique est
un des leviers pour préserver la ressource et
la qualité de l’eau. Autre levier, la gestion publique
de la ressource et du traitement de
l’eau. Ces deux points sont aussi à développer
dans les politiques territoriales en Euskal
Herria où l’enjeu eau est de plus en plus crucial
(pollutions bactériologiques de certaines
plages de la côte, pesticides dans la Bidouze,
etc.).
Les semences
« Contrôlez l’alimentation, et vous contrôlerez
les peuples », déclarait Kissinger au milieu des
années soixante-dix. Les semences sont la
base de l’alimentation humaine et animale.
On peut disposer de foncier, d’eau, la semence
constitue l’autre socle fondamental de la
souveraineté alimentaire. Or, les semences
sont aussi de plus en plus sous contrôle des
multi nationales telles Monsanto.
Dans la constitution française même, produire
ses propres semences pour un paysan n’est
plus un droit mais un « privilège ». L’échange,
le don, la vente de semences entre paysans
sont interdits. Seuls quelques vides juridiques
permettent encore des brèches. Le maïs en
est l’exemple le plus probant du Mexique à
Euskal Herria. Comment est-on passé de
multitudes de variétés de maïs dites de « population »
(ou fermières, ou paysannes) que
les paysans ont sélectionnées et re-semées
d’une année à l’autre, et qui étaient adaptées
au climat et au sol, tel le « grand roux basque »,
à des hybrides stériles qui obligent le paysan
à acheter sa semence chaque année? Par
des mécanismes de sélection et d’organisation
orientés vers le contrôle du vivant, la privatisation
du matériel génétique, la
collaboration avec les promoteurs des engrais
chimiques.
Les OGM ne sont qu’un pas supplémentaire
dans cette spirale infernale. La cohabitation
OGM/Non OGM est ici impossible. Un moratoire
est en place en France. Or, nous oublions
trop souvent qu’en Euskal-Herria
même, dans la province de la Navarre, la culture
des OGM est autorisée. Résultat: il est
impossible pour les paysans bios navarrais
de continuer à produire du maïs bio.
Pourtant sur le chantier de la sauvegarde des
semences libres, de nombreuses initiatives
de résistance existent et progressent. En Ipar
Euskal Herria des producteurs de maïs, de
blés panifiables, des maraîchers, des arboriculteurs,
etc. maintiennent et développent la biodiversité cultivée, seul rempart à la privatisation
du vivant.
La diversité de la production
Contrairement à bien d’autres régions, Euskal
Herria et notamment Iparralde a su résister à
la trop grande spécialisation. De multiples
productions animales et végétales sont encore
présentes. De la manex tête noire, à la cerise
d’Itasu, en passant par le piment
d’Espelette, le porc basque, la production céréalière
en Navarre, où encore les vignobles,
la diversité avérée est gage de complémentarité
entre ateliers et de maintien d’emploi sur
les petites fermes. Les retombées économiques
et sociales sont connues: entretien
des paysages gage d’un atrait touristique notamment,
maintien de la valeur ajoutée sur le
territoire, etc.
Mais, comme dans beaucoup d’endroits, le
Pays Basque continue à importer beaucoup
de denrées alimentaires: céréales, viandes,
proteines, etc. Il serait intéressant d’étudier
davantage les mécanismes d’une véritable
souveraineté alimentaire en Euskal Herria
aussi. Un programme ambitieux d’avenir qui
peut permettre d’atténuer quelque peu les
méfaits de la crise sociale et environnementale.

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