Une base de données sur l’église de Bascassan

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Une base de données (http://bazkazane.blogspot.fr) consultable sur internet présente ce monument. Elle offre la plupart des informations disponibles à ce jour sur cette église et son environnement culturel.  Ellande Duny-Pétré qui a réalisé ce travail répond à nos questions.

Enbata.Info : Qu’est-ce qui vous a donné l’idée de faire ce travail ?

Ellande Duny-Pétré : Tout d’abord, les qualités propres à ce lieu et son charme unique: une petite église dont le retable a été réalisé au XVIIe siècle, visiblement avec les moyens du bord, des peintures faites, non par des professionnels comme on peut le voir dans d’autres églises du Pays Basque, mais plutôt par des gens du cru ou des proches. Il s’agit de l’expression d’un art populaire. Sa facture rappelle les ex-votos naïfs que l’on voit dans de nombreuses églises d’Europe.
Autre raison : Bascassan a encore des chaises… Cela est très émouvant. Partout en Pays Basque et ailleurs, elles ont été remplacées par des bancs. Et Dieu sait si la chaise —donc le jarleku et le rite qui l’accompagne— est essentielle dans une église basque.

Bascassan a abrité la dernière benoîte du Pays Basque nord, décédée en 1991. On connaît l’importance de la benoite dans notre pays, c’est la raison pour laquelle j’ai mis sur le net les remarquables études de Michel Duvert et de Maite Lafourcade parues dans la revue Ekaina, aujourd’hui épuisée.
La benoîte Marie-Louise Cadiou était un personnage assez exceptionnel, très comédienne, qui savait valoriser ce lieu. Elle en était la gardienne sur le plan pratique, mais aussi symbolique. Avec sa disparition, un pan entier de notre paysage culturel s’est évanoui.

L’idée d’entreprendre ce travail provient enfin de mon attachement personnel à cette église où je suis venu à plusieurs reprises avec mon père, dès le début des années 60. Mon sentiment d’appartenance à l’égard du Pays Basque doit beaucoup à des lieux tels que Bascassan

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« Bascassan a encore des chaises… Cela est très émouvant. Partout en Pays Basque et ailleurs, elles ont été remplacées par des bancs. Et Dieu sait si la chaise —donc le jarleku et le rite qui l’accompagne— est essentielle dans une église basque. »

E. D.-P. : Aujourd’hui, pour trouver une information, chacun ouvre internet et interroge Google. Je me suis rendu compte que sur l’église de Bascassan, l’information était maigre et répétitive. En revanche, les sources livresques sont difficiles d’accès. Il faut passer plusieurs jours à la bibliothèque de Bayonne ou ailleurs, pour collecter les ouvrages disponibles ou les articles de revues. Aussi, j’ai constitué une base de données avec tous les éléments que j’ai pu rassembler, ainsi que des articles inédits. Chacun y a ainsi facilement accès, y compris en étant sur place. Vous pouvez lire les articles d’Olivier Ribeton ou de Gérard Eder dans l’église, ce qui est tout de même assez extraordinaire.

Enfin, je me suis rendu compte que l’attention de ma fille qui a douze ans porte d’abord sur l’audio-visuel. Donc, j’ai pensé réaliser une visite guidée avec des moyens audio-visuels et que l’on peut consulter à Bascassan même. Cette formule vient aussi du fait qu’aujourd’hui, tous les grands musées internationaux proposent des visites guidées que vous téléchargez. Le commissaire de l’exposition, le directeur du musée ou tel spécialiste commentent les œuvres devant vous… Il y a dix ans, cela était impensable.

Enbata.com : Pour cette visite guidée, pourquoi avez-vous fait appel à un moine de Belloc ?

E. D.-P : Effectivement, j’ai fait appel au père Marcel Etchehandy, bénédictin à l’abbaye de Belloc, natif de Saint-Michel, traducteur de la Bible et spécialiste en art sacré. La plupart de ceux qui ont écrit sur Bascassan, ont une approche historique ou du type histoire de l’art, donc plutôt esthétique. Pour contrebalancer cela, j’ai préféré une approche plus cultuelle. L’église de Bascassan, n’est pas qu’un joli décor, c’est d’abord un lieu de culte. C’est en tous cas sa fonction et ce pourquoi ceux qui l’ont édifiée. Il ne faudrait pas la voir comme une statue antique ou un masque africain, c’est-à-dire décontextualisée et donc terriblement appauvrie (1). Aita Marcel Etchehandy nous offre une magnifique lecture et nous la transmet. Je suis convaincu que dans cinquante ou cent ans, ses mots rendront encore vivants un univers qui frissonnera alors avec une «inquiétante étrangeté». Je ne voudrais pas faire de comparaison hasardeuse, mais je pense ici aux quelques minutes de film tourné au début du XXe siècle par le grand anthropologue Koxemiel Barandiaran à Ataun, son village natal : dans son musée, on y voit aujourd’hui un rituel dont la signification est perdue. Je crains que dans un siècle, le jeune Basque qui écoutera le Père Marcel Etchehandy ressentira la même «inquiétante étrangeté» que nous devant le film de Barandiaran des années 1920. Mais le visage et la parole vive du Père Marcel seront là, devant nous et nous toucherons encore du doigt un monde qui s’efface peu à peu, à la fois si proche et si lointain.

Je compte prochainement filmer une messe donnée à Bascassan, avec la présence des fidèles de la paroisse. Là aussi, il s’agit de montrer que cette église est un lieu vivant où des Basques éprouvent et disent leur foi.

Bazkazane 662En rassemblant la documentation disponible, j’ai constaté qu’elle était intégralement en langue française, il n’y avait quasiment rien en langue basque. Toute proportion gardée, un peu comme si en France, toute la documentation disponible sur le château de Chambord ou le Mont Saint-Michel était en allemand et rien en français. En Catalogne, les travaux de recherches sur de très nombreux monuments historiques ou religieux sont en catalan et cela depuis plus d’un siècle. Leur vulgarisation aujourd’hui est faite en quatre ou cinq langues, y compris le braille… avec des moyens techniques que l’on peine à imaginer dans la grande misère culturelle du Pays Basque Nord de 2017.

Aussi, il était essentiel que le Père Marcel Etchehandy nous présente, nous explique Bascassan en euskara, la langue des habitants qui l’ont construit hier et qui y vivent aujourd’hui.

C’est donc là l’ambition du blog Bazkazaneko eliza : offrir un bouquet d’informations en basque et en français. Mon vœu le plus cher : que ceux qui prendront la peine de le voir, de l’entendre ou de le lire, en fassent leur miel, s’approprient ce lieu chargé de sens et d’humanité. Je pense aux simples visiteurs, mais aussi aux enseignants qui voudraient faire découvrir à leurs élèves toutes les richesses insoupçonnées de Bascassan.

Quelle suite espérez-vous donner à ce travail ?

Les idées ne manquent pas. Je songe à une visite guidée de plusieurs maisons basques, aux chapelles Saint-Sauveur d’Iraty ou d’Ascombeguy. Mais cette démarche dépend beaucoup de la rencontre avec la ou les personnes susceptibles d’intervenir en apportant un commentaire à la fois vivant et de qualité sur le fond.

(1)    En montant les images du père Marcel Etchehandy, je pensais à cet extrait du film d’Alain Resnais et Chris Marker Les statues meurent aussi : «Un objet est mort quand le regard vivant qui se posait sur lui a disparu. Et quand nous aurons disparu, nos objets iront là où nous envoyons ceux des nègres : au musée. L’art nègre : nous le regardons comme s’il trouvait sa raison d’être dans le plaisir qu’il nous donne. Les intentions du nègre qui le crée, les émotions du nègre qui le regarde, cela nous échappe. Parce qu’elles sont écrites dans le bois, nous prenons ses pensées pour des statues. Et nous trouvons du pittoresque là où un membre de la communauté noire voit le visage d’une culture». En remplaçant le mot nègre par le mot basque, on mesure toute la portée du discours de Marcel Etchehandy.

 

Le contenu du blog Bazkazaneko eliza : http://bazkazane.blogspot.fr

Documents audio-visuels:
– Visites guidées en euskara avec le Père Marcel Etchehandy, bénédictin à l’Abbaye de Belloc:

+ Une première série en 11 chapitres de 5 à 10 minutes chacun, a été réalisée en 2017.
+ Une deuxième série découpée en 21 parties a été enregistrée en 2016. Elle est plus détaillée que la première.

– Un enregistrement la dernière benoïte de Bascassan, Marie-Louise Cadiou, figure en fin de ce blog. Il a été réalisé par Gérard Eder le 27 août 1987.

Articles sur Bascassan:
– Gérard Eder: La chapelle de Saint André.
– Gérard Eder: Le saint oublié de la chapelle de Bascassan.
– Peio Jorajuria: Bazkazane ta Alzietako kaperak.
– Olivier Ribeton: Architecture religieuse, le décor des églises jumelles.
– Odile Contamin: L’Eglise d’Alciette.
– Gil Reicher: Une excursion aux églises d’Alciette et de Bascassan.
– Marie-Michèle Esponde: Testament de Dominique Saint Martin, vicaire de Bascassan.
– Abbé Pierre Haristoy: Saint André de Bascassan.
– Louis Colas: La tombe basque, Alciette et Bascassan.
– Base Mérimée: Bascassan.

Autres articles:
– Marcel Etchehandy: IHS ohar zenbait.
– Michel Duvert: Andere serora, la femme et le sacré dans la civilisation basque.
– Maite Lafourcade: La charge de benoîte en Pays Basque.
– Traité de benoîterie à Bussunaritz-Sarrasquette.
– Itsaso Arizmendi: Serorak, emakumezkoak elizen zaindari.
– Jesus Maria Arruabarrena: Diburzi izenez, serora ogibidez.

 

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