L’hémorragie Airbnb stoppée net

Fraude à la compensation, Alda occupe un meublé
de tourisme illégal le 19 juin 2023 à Biarritz

Un an après son entrée en vigueur, retour et premiers bilans sur le règlement de la Communauté Pays Basque soumettant les autorisations de changement d’usage d’un local d’habitation en meublé de tourisme au principe de compensation.

Février 2021 : la cour de cassation valide définitivement la mesure dite de compensation adoptée dès 2018 par les grandes villes de l’Hexagone telles que Paris, Lyon, Nantes ou Bordeaux. Le développement exponentiel d’Airbnb dans les grandes métropoles s’y voit considérablement freiné.

Lanceurs d’alerte

Juin 2021 : l’association Alda révèle pour la première fois au grand public l’importance de l’hémorragie causée par Airbnb sur le parc locatif privé du Pays Basque nord (41.670 logements en 2017). Ces dernières années, autour de 10.000 logements entiers ont été transformés en meublés de tourisme, le phénomène explosant littéralement depuis 2016. Il y a urgence à agir : en effet, suite au coup d’arrêt porté par les grandes métropoles françaises, Airbnb et les autres plateformes ont décidé d’un redéploiement stratégique vers les petites villes du littoral et les territoires ruraux. Le Pays Basque est en première ligne. Bref, le pire est à venir. Alda produit alors une note juridique démontrant que la mesure de compensation, normalement applicable dans les villes de plus de 200.000 habitants, l’est également dans les 24 communes de la zone tendue d’Iparralde.

Des élus à la hauteur

Très rapidement, la communauté d’agglomération Pays Basque prend le problème à bras-le-corps. Dans un contexte de forte mobilisation citoyenne, elle adopte à la quasi- unanimité une mesure de compensation particulièrement courageuse et contraignante. Cette mesure oblige à produire, à partir de locaux non destinés à l’habitation, un nouveau logement de surface équivalente et dans la même commune pour tout logement transformé en meublé de tourisme. Cela rend très difficiles — voire impossibles — ces transformations, et protège définitivement le parc locatif à l’année.

Une mesure efficace

Cette réaction rapide et déterminée de la CAPB est venue protéger le Pays Basque d’une vague sans précédent causant des ravages depuis 2021 dans le parc locatif privé sur toute la façade atlantique, des Landes à la Bretagne.

Cette réaction rapide et déterminée de la CAPB est venue protéger le Pays Basque d’une vague sans précédent causant des ravages depuis 2021 dans le parc locatif privé sur toute la façade atlantique, des Landes à la Bretagne.

Ici, dès le vote de la compensation en mars 2022 et surtout depuis son entrée en vigueur en mars 2023, l’hémorragie a été stoppée net. Les autorisations de changement d’usage, transformant les logements habités à l’année en meublés de tourisme, sont devenues rares alors qu’elles se succédaient par milliers les années précédentes. Ce simple fait, essentiel, valide à lui seul le bien-fondé du vote de cette mesure par la CAPB. Et au cours des années qui viennent, un autre résultat positif va venir renforcer sa pertinence.

Combattre la fraude

La majorité des propriétaires de meublés de tourisme sont des personnes physiques qui disposaient d’une autorisation temporaire de changement d’usage pour trois ans. Cette autorisation prendra donc fin d’ici 2025. Des milliers de logements vont ainsi pouvoir être récupérés pour l’habitation à l’année, le logement d’étudiants ou la vente en résidence principale. Une minorité de propriétaires sont des personnes morales (SCI, SARL), non concernées par les autorisations provisoires. La compensation leur est donc applicable depuis le 1ᵉʳ mars 2023. On voit ainsi les premiers Airbnb, propriétés de SCI ou de SARL, redevenir des locations à l’année. Mais ce phénomène est encore limité du fait d’une fraude massive. Alda estime qu’il existe autour de 2.000 meublés de tourisme illégaux en 2023. Soit plus d’une année entière de production de logements dans le parc privé !

On comprend dès lors l’importance de poursuivre et de faire condamner cette fraude. Les propriétaires risquent, pour chaque logement ne respectant pas la compensation, une amende de 50.000 euros et l’obligation de le remettre en location à l’année. L’année 2024 devrait voir les premières poursuites engagées, avec probablement un fort effet de dissuasion.

Ce n’est qu’un début…

Ce combat pour protéger nos logements de leur vampirisation par Airbnb et compagnie a fait avancer dans les esprits la nécessité de réguler et encadrer fortement le marché. La bataille des idées a largement été gagnée à ce niveau. Réalisé en 2023 sur la question du logement en Pays Basque, le sondage IFOP a ainsi montré de claires majorités en faveur de l’encadrement des prix de vente par les pouvoirs publics (55%), de l’encadrement renforcé des loyers (63%) et de la compensation (71%). Depuis, le gouvernement a validé la candidature de la CAPB au dispositif d’encadrement des loyers et d’autres avancées ont eu lieu. Un an après la mise en oeuvre de la compensation, le Pays Basque a de nombreuses raisons de se réjouir… et de continuer à se mobiliser plus que jamais !

ULMT64 : subornation de témoins ?

L’avenir du règlement instaurant la compensation dans la zone tendue du Pays Basque reste suspendu à la décision des juges sur le fond des recours déposés, notamment par l’Union des Loueurs de Meublés de Tourisme 64 (ULMT64).
Le journal Alda a révélé que ce lobby local invitait ses membres à mentir aux collectivités locales, à l’opinion publique et aux juges pour cacher les premiers effets positifs de la compensation, qui ne concerne donc pour l’instant que les personnes morales. Sa présidente écrivait ainsi aux SCI et SARL adhérentes de l’ULMT64 et ayant reçu des courriers de certaines mairies : « Nous vous déconseillons de leur dire ce que vous avez fait de votre bien (vente, bail à l’année, bail mobilité …). Cette information pourrait nous desservir pour la procédure d’appel à Bordeaux. L’Agglomération pourrait utiliser ces informations auprès des juges pour tenter de démontrer le bien-fondé de cette réglementation. ». On n’est pas loin ici de la subornation de témoins, délit sanctionné de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende.
Couvrir la fraude
D’autre part, les révélations d’Alda démontrent que l’ULMT64 couvre délibérément la fraude en cours. Dans le même courrier adressé aux personnes morales ayant reçu des questionnaires ou mises en demeures de la CAPB et des communes, on lit les deux conseils suivants : « Il est important d’y répondre et notamment d’y préciser que depuis l’entrée en vigueur de la réglementation le 1ᵉʳ mars 2023, vous ne louez plus votre bien. », et « Pour les personnes morales qui ont reçu ce courrier et qui au-delà du 1ᵉʳ mars ont continué à louer, notre avocat, Victor Steinberg, vous conseille vivement de prendre contact avec lui. Ces courriers sont les prémices d’une procédure contentieuse. ». On ne peut être plus clair : si vous continuez à louer illégalement votre meublé de tourisme, répondez bien aux autorités que vous ne le louez plus.

Deux poids, deux mesures

À quand une descente de police à 6h00 du matin chez tous ces délinquants ? Quand on voit que ce fut récemment le traitement infligé à quatre militant.e.s d’Ostia (*) à qui la police reprochait… d’avoir couvert de terre une maquette de Bouygues immobilier, on a du mal à comprendre l’absence totale d’enquêtes contre ces fraudes massives, graves, assumées, et a priori réalisées en bande organisée, qui ont des conséquences dramatiques pour tant de familles privées de logement en Pays Basque.

(*) Ces militant.e.s comparaîtront le 12 mars devant le tribunal de Bayonne et doivent recevoir tout notre soutien.

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Une réflexion sur « L’hémorragie Airbnb stoppée net »

  1. Eskerrik asko ALDA, egiten ari zareten lanarengatik. Alokatze kontratu bat egiten delarik, normaki ezin da jendea kanporatu lekua turista bati uzteko. Alokatu duenak eskubide osoa dauka etxean edo apartamentuan egoteko, bere alokatzea pagatzen duen bitartean. Bestela kontratua senatzeko egunean gauza hori argi eta garbi adosturik eta idatzirik izan behar da. Halako kasu batean aurkitu nintzen Erromardin 1976 urtean, baita urte berean, Delfinateko Saint Pierre d´ Allevard herrian. Hasieran esan zidan erromardiarrak uztailan eta abuztuan utzi zidan apartamentua udatiarrei alokatzen ziela, 10 adiz garestiago. Horren truke gela bat utzi zidan bere etxean. Nahiko errez zitzaidan naski donadua nintzelako.Baina tratua ezin izan zen hobeagorik. Beste denboraldia zen, eta Airbnb bezalako mamuak ez genituen inguruetan. Nire ustetan Airb andb bezalako sistemak debekatu beharko litzateke, kapitalismo basatiarantz eramaten gaituztelako.

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