Pays Basque, terre de deuil

EH-HarreraHerria

Terre d’accueil, le Pays Basque devient, avec le durcissement des politiques migratoires, une terre de deuil pour les exilés. Alors que l’équilibre de notre territoire est menacé par l’afflux de résidents secondaires, il faut un acte 2 de la solidarité pour les migrants.

Le mardi 12 octobre dernier, nous nous réveillions avec une terrible nouvelle. Trois migrants avaient été happés par un train sur la voie ferrée entre Donibane Lohizune et Ziburu. Au total cinq migrants ont, depuis avril 2021, trouvé la mort en voulant traverser le Pays Basque nord. De combien de morts devons-nous être témoins pour qu’enfin, nous prenions les mesures nécessaires pour arrêter ces drames ?

A Calais, ce sont plus de 300 personnes qui, en 21 ans, ont perdu la vie en espérant atteindre les côtes britanniques. Ce chiffre vertigineux n’empêche pourtant pas le harcèlement et le traitement indigne des personnes migrantes par les autorités locales et les forces de l’ordre. Le contexte de pré-campagne électorale, où le thème de la migration est au centre de l’attention médiatique, alimente un jeu malsain électoraliste de surenchère et un durcissement des attitudes à l’égard des migrants. Face à la banalisation de cette violence, un prêtre et un couple de militants entamait le 11 octobre dernier une grève de la faim très suivie sur les réseaux sociaux sous le hashtag #FaimAuxFrontières. Ils exigeaient des autorités publiques une trêve hivernale des expulsions, l’arrêt des confiscations des tentes et effets personnels des personnes exilées ainsi que l’ouverture d’un dialogue raisonné avec les associations non mandatées par l’État. En somme, ils demandent simplement de considérer ces personnes exilées comme des êtres humains.

Ici, au Pays Basque aussi, ce sont quelques citoyens qui se battent pour que les personnes migrantes retrouvent leur dignité. Sans l’inlassable travail de Marie Cosnay, Mohamed Kemal, Fayçal Hamadouche et ce père de famille probablement originaire de Chlef en Algérie, les victimes seraient aujourd’hui encore toutes trois réduites à l’unité d’une somme abstraite de morts. Comme pour Yaya Karamoko et Abdoulaye Koulibaly, les deux jeunes migrants morts noyés en tentant de traverser la Bidassoa, l’écrivaine bayonnaise a retrouvé leur identité, retracé leur parcours, contacté leur famille respective pour leur apprendre la plus triste des nouvelles, pour leur permettre de faire le deuil et enfin, a raconté leur histoire dans un ultime hommage.

Mais cet engagement de justes parmi les nations du XXIe siècle et celui de tous les bénévoles des associations d’aide aux migrants, s’épuisent avec le temps et surtout devant les moyens toujours plus imposants et les mesures toujours plus strictes déployés par le ministère de l’Intérieur. Pourtant, le renforcement des contrôles aux frontières et les technologies de pointe utilisées ne pourront jamais dissuader les exilés en quête d’une vie meilleure, quitte à prendre toujours plus de risques. L’Etat français le sait, mais il faut croire que sa stratégie, lâchement criminelle, consiste à leur rendre la vie impossible en espérant les voir disparaître d’eux-mêmes sous l’apathie générale. Notre société, malade, atrophie notre empathie et fabrique à la chaîne des déficients affectifs capables d’une indifférence morbide.

Solidarité aux migrants : Acte 2

En 2018, face à l’afflux des migrants place des Basques à Bayonne, les habitants s’étaient spontanément organisés pour offrir aux arrivants exténués un repas chaud, une douche, une nuit de repos, des vêtements avant de reprendre leur route. La mairie de Bayonne avait suivi cet élan de solidarité en créant le centre d’accueil Pausa. Trois jours de répit assurés 24h/24, 7jours/7.

Mais encore faut-il traverser la frontière et se rendre jusqu’au centre du quai de Lesseps. En plus de traquer les trains, les bus, en procédant à des contrôles au faciès, depuis quelques semaines, la police rôde à Bayonne près de la gare et aux abords de Pausa. Les personnes qui ne peuvent justifier de la régularité de leur situation sont renvoyées illico à la frontière. L’accident mortel du 12 octobre est en réalité une conséquence de cette traque aux migrants.

Nous avons besoin d’un Acte 2 de la Solidarité où les communes et l’Agglo travaillent avec les citoyens engagés qui agissent sur le terrain. Il est plus que temps de refaire preuve de courage politique pour sécuriser le parcours des migrants en coopération transfrontalière.

L’argent, l’ultime passeport ?

Comme me le répète souvent un jeune Ivoirien, notre lieu de naissance sur cette planète et nos ressources définissent si nous sommes migrant ou touriste lorsque nous traversons une frontière, déterminant ainsi le traitement qui nous sera réservé par le pays étranger. Alors même que la CAPB fait partie du palmarès hexagonal des EPCI au taux le plus haut de résidences secondaires détenues par les plus fortunés, elle est aussi une zone de passage de personnes qui se battent au quotidien pour leur survie. Comment peut-on supporter que des disparités aussi abyssales puissent exister et continuer d’augmenter sous nos yeux ?

Certains diront qu’on ne peut accueillir toute la misère du monde pour justifier le laisser faire des politiques migratoires inhumaines. Mais ce sont souvent les mêmes qui trouvent normal qu’il y ait plus de 41 000 résidences secondaires dont plus de 45% détenues par un ménage aisé dans un territoire ou la situation de logement est critique. Et si on décidait plutôt, comme le disait un candidat d’EHBai aux élections départementales, qu’on ne pouvait pas accueillir toute la richesse du monde?

De par la spécificité de notre territoire, le contexte xénophobe grandissant et l’arrivée de migrants environnementaux, poser des politiques de solidarité est non seulement une question vitale pour des centaines de personnes mais également déterminante pour notre capacité à rester une terre d’accueil.

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3 réflexions sur « Pays Basque, terre de deuil »

  1. Le pays basque ne peut pas accueillir toute la richesse du monde

  2. Je suis d’accord faire la chasse aux migrants est une véritable honte , et je plein aussi les policiers qui le soir en rentrant chez eux , doivent vivre avec le fait de ne pas étre au service de la société , mais rajouter de la souffrance au malheur .
    Voila le vrai visage de la social démocratie de E. Macron . Le centrisme Européiste de F. Bayrou est aujourd’hui au pouvoir sous la forme d’un homme qui a le gout du grand cérémonial et du discours lyrique mais a l’idéologie de la girouette et du culte de la personnalité . Un mélange de grand n’importe quoi et qui ne réglera jamais les problèmes dont sont confrontés les gens !

    Mais dans l’article il manque un paragraphe !
    Qu’elle sera la politique migratoire des Abertzale dans un Pays Basques libres et souverains ???
    Nous donnerons aux migrants le gite et le couvert , ceux qui est humain et ensuite ?
    Que ferons nous ? Nous expulserons par avion les migrants économiques pour garder ceux qui cherche asiles ? Ou nous intégrerons tous les gens de passages pour en faire de bon euskaldun fededun ? Que ferons nous des migrants qui seront condamnés pour des crimes et délits ?

Les commentaires sont fermés.