Plazara, pour rendre l’euskara plus audible, plus visible et plus utilisé au quotidien

Présentation de Plazara à Azkaine

Plazara, collectif pluridisciplinaire qui a pour vocation de rendre l’euskara plus présent dans le quotidien des acteurs et des habitant·e·s du territoire, a fait son apparition publique sur la place d’Ascain le 26 septembre dernier, à l’occasion de la Journée européenne des langues. Eneko Gorri et Kamila Harluxet Gratien, deux des quatre porteurs de projet qui ont choisi de dédier leur temps à la construction de cet outil, répondent aux questions d’Enbata.

Plazara va au contact des acteurs de la société dans une démarche inclusive, pédagogique et déterminée, avec des solutions concrètes autour de l’euskara (…)

Les avancées de ces dernières années ne doivent surtout pas donner l’illusion d’une situation stabilisée. En Ipar Euskal Herria, l’euskara reste en position extrêmement vulnérable.

Le Collectif Plazara souhaite contribuer au processus de revitalisation linguistique du territoire. Comment décririez-vous la situation générale de la langue basque ?

Eneko Gorri : En 50 ans, les choses ont beaucoup évolué autour de l’euskara. Durant de longues décennies, la revitalisation de la langue basque a été exclusivement portée par une partie de la société et le mouvement associatif. Ils ont oeuvré seuls, souvent à contre-courant et en subissant parfois un fort mépris pour un combat éminemment juste. Puis, à partir du début des années 2000, une politique publique a commencé à se structurer sous la pression militante. C’est à ce moment que se structure l’Office public de la langue basque, les communes et intercommunalités se mettent à développer des politiques linguistiques… Dès lors, le monde associatif et les institutions s’attellent à reconstruire un lien Les avancées de ces dernières années ne doivent surtout pas donner l’illusion d’une situation stabilisée. En Ipar Euskal Herria, l’euskara reste en position extrêmement vulnérable. entre l’euskara et les habitant·e·s du territoire, abîmé par des décennies de politiques linguicides. Pour assurer une transmission de la langue que les familles ne pouvaient assurer seules, on a créé nos ikastola, puis développé l’enseignement dans les écoles publiques et confessionnelles. Puis, on a mis en place des centres de loisirs en euskara, fondé un centre pédagogique et ouvert des crèches en immersion. On a couvert le territoire de Gau eskola pour permettre aux adultes d’apprendre ou réapprendre l’euskara. Des médias bascophones ont vu le jour et l’euskara a fait son entrée progressivement dans le monde socioéconomique… Il y a aujourd’hui tout un écosystème qui oeuvre au quotidien autour de la langue basque. Mais ce travail reste très précaire et trop atomisé. Et les avancées de ces dernières années ne doivent surtout pas donner l’illusion d’une situation stabilisée. En Ipar Euskal Herria, l’euskara reste en position extrêmement vulnérable.

Eneko Gorri : « Les avancées de ces dernières années ne doivent surtout pas donner l’illusion d’une situation stabilisée. En Ipar Euskal Herria, l’euskara reste en position extrêmement vulnérable. »

Avec quels objectifs Plazara souhaite-t’elle s’insérer dans cet écosystème ?

Kamila Harluxet Gratien : Nous sommes une équipe qui réunit des personnes de profils variés : sociolinguistes, pédagogues, traducteurs, communicants, formateurs, gestionnaires de projets… Notre objectif général est de rendre l’euskara plus audible, plus visible et plus utilisé au quotidien (euskaraz erraten dugu ere : « erdaldunentzat euskara hurbilago, euskaldunentzat presenteago, egiturentzat praktikoago »). Pour cela, Plazara va au contact des acteurs de la société dans une démarche inclusive, pédagogique et déterminée, avec des solutions concrètes autour de l’euskara leur permettant de contribuer directement au processus de revitalisation linguistique. C’est ce à quoi nous nous attelons depuis douze mois maintenant. La société change à une vitesse vertigineuse et l’apport des révolutions numériques continuera à bouleverser nos vies et nos pratiques linguistiques. Face à cela, nous devons agir ensemble si on veut assurer un avenir à l’euskara et aux milliers de langues minorées à travers le monde. On s’inscrit donc forcément en complémentarité et en lien constant avec les acteurs qui oeuvrent déjà au quotidien, autrement dit « elkarlana ».

Kamila Harluxet Gratien : « Plazara va au contact des acteurs de la société dans une démarche inclusive, pédagogique et déterminée, avec des solutions concrètes autour de l’euskara (…) »

Pouvez-vous souligner la spécificité du travail de Plazara pour atteindre cet objectif ?

Eneko Gorri : On bataille sur plusieurs fronts ; du coup, ce n’est pas toujours facile de résumer ce que Plazara fait. Disons que d’une part, nous proposons des services de communication, conseil et formation en direction de divers opérateurs (commerces, associations, entreprises, collectivités, clubs sportifs…). Mais ce qui nous anime par-dessus tout, c’est de créer des outils innovants afin de tisser des liens solides entre les habitants du territoire et l’euskara (jeux, ateliers, lexiques, initiations, évènements, guides, podcasts…).

On travaille par exemple à la création d’un Escape game interactif sur la diversité linguistique, on élabore un parcours de formation sur les questions linguistiques et culturelles, on prépare un congrès international des communautés linguistiques en lutte à travers le monde, on construit une stratégie partagée de sensibilisation du public à la langue basque avec la création d’outils numériques référents… En somme, Plazara fait de la sociolinguistique appliquée ou de la médiation linguistique. Mais tout cela, nous ne le faisons pas seuls. Nous travaillons avec Euskalgintza au sein d’Euskal Konfederazioa, et aussi sur des partenariats forts avec Garabide, Soziolinguistika klusterra, Euskarabentura…

Sur quels autres projets travaillez-vous et avec qui ?

Kamila Harluxet Gratien : On accompagne par exemple Uda Leku à évaluer et améliorer la pratique de l’euskara au sein des Bilgune (accueils de loisirs). On agit avec les ikastola pour renforcer le positionnement des parents, pour un meilleur épanouissement linguistique de leurs enfants. On anime des ateliers sur la sociolinguistique auprès des élus du territoire avec la CAPB ou les mairies. On étudie avec Euskal Moneta les pistes d’actions autour de la langue basque. On élabore des plans euskara de façon collégiale avec des mairies ou des structures comme le Connecteur à Biarritz… On s’est lancé dans une aventure un peu folle, mais sans routine. C’est vraiment agréable de côtoyer tous ces mondes qui cohabitent au sein du même Euskal Herri.

Vous déclinez à votre façon la maxime « agir local, penser global ».

Eneko Gorri : Plazara naît en effet au début de la Décennie 2022-2032 des Langues autochtones, proclamée par l’Unesco. En ce sens, on fait de la coopération entre acteurs linguistiques à travers le monde un axe fort de Plazara. Les peuples qui luttent pour leur langue à travers le monde nous inspirent. Ensemble, on arrivera à donner un écho plus fort à la question de la diversité linguistique.

Mi-septembre, Plazara et Garabide recevaient cinq jeunes rifains, venus échanger sur les pratiques respectives en direction de l’euskara ici et du tarifit (langue amazigh) là-bas. En octobre, des activistes d’Amérique du Sud (Abya Yala) ont assisté à une formation de longue durée sur « les stratégies de revitalisation linguistique ». En janvier, on recevra des mayas venus du Yucatan. Nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres. C’est aussi une façon de placer la lutte en faveur de l’euskara dans une dimension internationale.

Comment les citoyen·ne·s ou les organisations de la société civile peuvent s’impliquer concrètement avec Plazara ?

Kamila Harluxet Gratien : Plazara ne pourra pas se résumer à être le projet porté par cinq personnes. En septembre, on a lancé une campagne d’adhésion qui se termine fin décembre (« Plazatik altxa dezagun Plazara »). Les citoyen·ne·s d’Euskal Herria peuvent adhérer en choisissant deux formules : Plazalagun et Plazakide. Les Plazalagun apportent un soutien moral et financier au projet (au choix : 10€, 20€, 50€… pour toute l’année). Les Plazakide peuvent contribuer en apportant en plus un coup de main ponctuel ou régulier, en fonction de leur disponibilité et de leurs appétences. Cela peut être en tenant un stand d’information sur l’euskara, animant un atelier, concevant des infographies, relisant des supports de sensibilisation, participant à la fabrication de jeux… A ce jour, plus d’un tiers des adhérents ont choisi la formule Plazakide. Preuve qu’il existe un engouement pour le projet et une envie d’agir concrètement. Au-delà des citoyen·ne·s, les organisations aussi peuvent adhérer et/ou travailler avec nous à mettre plus d’euskara dans leur quotidien. On cherche également un local technique de 40m² environ. Bref ! Les façons d’aider un tel projet dans sa phase de lancement ne manquent pas. En janvier, on tiendra notre première assemblée générale ouverte à tou·te·s. Ce sera l’occasion de présenter en détail le bilan des douze mois d’activité. Mais surtout, d’exposer les projets des trois années à venir et les raisons d’un passage en coopérative.

Azken hitza…

Eneko Gorri : La lutte en faveur de la langue basque a quelque chose d’épique : « Ez dok 13 », il n’y a pas de fatalité ; par leur action déterminée, nos prédécesseurs ont réussi à enrayer un déclin programmé de l’euskara. Plazara est en quelque sorte héritier de cette capacité du territoire à se doter des outils dont il a besoin pour donner un avenir à notre langue et notre culture. Je me souviens d’une discussion avec Jakes Abeberry qui me disait : « en matière d’euskara, on a fait le plus facile. On vous laisse le plus difficile. » C’est vrai qu’il reste encore beaucoup de choses à faire. Il faudra faire preuve d’inventivité, de détermination, d’audace… Mais c’est un combat juste et beau. On encourage les gens à nous rejoindre. Elkarrekin eraman dezagun euskara Plazara!

Info+ : www.plazara.eus/ [email protected]

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