Jakes Abeberry, promoteur de la culture basque

Jakes Abeberryn en haut à gauche, lors d'une réunion du groupe Izan (Etre) qui se définissait comme “Collectif abertzale autogestionnaire”  à l'aube des années 80. Plus  d'information ici :  www.enbata.info/articles/izan-en-ligne
Jakes Abeberryn en haut à gauche, lors d’une réunion du groupe Izan (Etre) qui se définissait comme “Collectif abertzale autogestionnaire” à l’aube des années 80. Plus d’information ici : www.enbata.info/articles/izan-en-ligne

Txomin Heguy, 2 décembre 2022

Jakes Abeberry nous a quittés. Je ne vais pas répéter ici tout ce qui a été dit et écrit à propos de son parcours hors du commun. De l’immense apport de Jakes au Pays basque nord et au-delà au Pays basque tout entier. Sur le plan politique ou sur le plan économique. Mais aussi à Biarritz et plus particulièrement à la vie culturelle de Biarritz. Car Jakes était viscéralement biarrot. Un abertzale fervent pour sûr, mais d’abord biarrot.
Il me semble-hormis des déclarations de Filgi Claverie rapportées brièvement dans Berria du 1 décembre 2022- qu’il a été peut fait mention de l’engagement visionnaire et indéfectible que fut celui de Jakes en faveur du processus d’organisation des outils en faveur de la langue et la culture basques.

En 1981, dès l’arrivée de Mitterrand à la présidence française se réunissait au Musée Basque de Bayonne les premières Assises de la Langue et la Culture Basques. Cette réflexion partagée allait produire un texte historique intitulé « Pour un statut de la Langue et la Culture Basques » qui fut paraphé par 23 associations et 2 syndicats. Il va de soi que Jakes participa à ces rencontres. Cela conduira en 1984 à la naissance de la Fédération des associations culturelles basques Pizkundea. A ce niveau là aussi, l’apport de Jakes fut indéniable. La même année, le Centre Culturel du Pays Basque ouvrit ses portes. Premier organisme officiel financé par des fonds publics censé soutenir la culture basque, mais organisme sous haute surveillance : sur les 15 administrateurs, 12 représentants les collectivités publiques et l’Etat, 3 représentants le monde culturel, à savoir les représentants de Pizkundea : Jean Harischelhar, Ramuntxo Camblong et Jakes Abeberry. Toujours présent Jakes, entré par la moindre porte ou fenêtre entrebâillée. Pourtant, ce n’était pas les moments les plus apaisés pour œuvrer en faveur de la langue et la culture basques. La création du Centre Culturel du Pays basque brisa quelque peu immédiatement l’unité de Pizkundea : Seaska, AEk et l’association Arroka quittèrent la fédération faisant état de leur désaccord. Pour Jakes, l’attitude de l’association culturelle basque de Biarritz Arroka ne fut pas, on s’en doute, une nouvelle réjouissante. Par ailleurs durant cette même période, le gouvernement socialiste français entamait sa politique d’extradition des réfugiés basques et le GAL commettait ses attentats criminels, mettant à feu et à sang les rues du Pays basque nord.

Après deux premières années prometteuses, la situation se tendit à l’intérieur du Centre Culturel du Pays basque. A partir de 1986, le virage désastreux que donna le nouveau directeur Dominique Burucoa au projet du Centre conduisit les représentants du monde culturel basque, dont Jakes Abeberry, à mener la politique de la chaise vide au sein son Conseil d’administration. Les questions soulevées par les 3 centres culturels du Pays basque intérieur Uhaitza, Haize Berri et Eihartzea, l’éviction de la candidature de Manex Goyhenetche au poste de littérature au sein du Centre et bien d’autres problèmes envenimèrent la situation et en 1988, l’expérience du Centre Culturel du Pays basque cessa. Durant toute cette période conflictuelle, le soutien de Jakes Abeberry à la démarche commune de Pizkundea fut sans faille. Sans détours mais avec un sens diplomatique inégalable.

Ensuite, ce fut la naissance du Syndicat Intercommunal pour le soutien à la Culture basque en 1989. Dès le début, 136 communes y adhérèrent ! Et parmi elles, toutes les plus grandes villes ! Quatre à cinq ans plus tard, une dizaine d’autres communes rejoignaient le Syndicat. Pour la première fois, la quasi-totalité des communes du Pays basque nord se regroupaient autour d’un thème, qui plus est celui de soutenir la culture basque- qui aurait imaginé cela quelques temps auparavant ?- et en votant un budget, pensez donc : 2 francs par habitant ! Certes, mais n’était-ce pas là expérimenter les prémices de ce qui deviendra 30 ans plus tard la Communauté d’Agglomération Pays basque ? Jakes Abeberry fut au centre de cette évolution décisive autant qu’inespérée avec Harischelhar, Camblong et d’autres… sans oublier l’indispensable Erramun Bachoc.

La mise en place du Syndicat Intercommunal pour le soutien à la Culture basque permit la création de l’Institut Culturel basque. Là aussi, on retrouve Jakes Abeberry, membre du collège des associations culturelles et inutile de dire que son soutien inlassable et obstiné ne fut pas de trop durant ces premières années décisives, nous aidant à maintenir le cap malgré les vents violents contraires.

Et puis vint la mise en place de la réflexion Pays basque 2010 à partir de 1992, la création du Conseil de Développement du Pays basque en 1994 et dans la foulée celle du Conseil des Elus en 1996 où l’on retrouve évidemment la présence de Jakes Abeberry. Il est vrai que dès lors, Jakes était déjà adjoint à la mairie de Biarritz et qu’à ce titre il ne pouvait que se retrouver au Conseil des Elus du Pays basque…

Durant ces quinze années, j’ai souvent croisé Jakes, dans l’effervescence de ce chemin que nous avons mené en faveur de la Langue et la Culture basques. J’ai beaucoup appris à son contact, et comme moi, sans doute beaucoup d’autres. Surtout, ne jamais abandonner. Au milieu de toutes les difficultés, les contraintes, les échecs, continuer à ouvrir des voies, pas à pas, actions après actions, avec fermeté et patience. L’impossible est construit par l’acte. Des gens comme Harischelhar, Camblong, Abeberry furent des bâtisseurs. Chacun avec sa part de lumière et d’ombre, mais des bâtisseurs. Comme un Michel Berhocoirigoin pour le monde paysan. Des bâtisseurs visionnaires d’outils qu’ils leur semblaient nécessaires à l’édification de la maison commune. Et pour nous, la génération suivante, des diffuseurs d’encouragement et de confiance infatigables. Des guides.

Jakes, lorsque je me baladerai du côté du col de Zizkoitz sur la Rhune, dans le giron des pierres que le sculpteur Pantxoa St Esteben a réveillé en l’honneur de ton frère Maurice, je me permettrai de te demander quelques conseils quant à l’avenir de notre Euskal Herri. Je suis convaincu que tu ne resteras pas silencieux. Et que peut-être, tu me les chuchoteras en basque.

Txomin Heguy, 2 décembre 2022

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