Le pays du bien dire

AquariusLe problème des réfugiés ne peut pas être réglé par chaque Etat pour son propre compte : il nécessite une action solidaire au  niveau de l’Europe.

La France est-elle vraiment “le pays des droits de l’homme” ?

Non !

Elle est le pays de la Déclaration des droits de l’homme, d’abord en 1789 sous la signature de Mgr Champion de Circé, archevêque de Bordeaux, puis en 1948 sous la plume de René Cassin, éminent juriste, de confession israélite : encore un complot judéo-chrétien !

La France est la patrie du bien dire, championne du monde du Verbe élégant, clair et précis.

Je le dis sans excès d’ironie, car elle produit une littérature fabuleuse que peuvent lui envier la plupart des autres Etats du monde. Mais du bien dire au bien faire il y a un fossé, parfois un abîme qui n’est pas toujours comblé, il s’en faut de beaucoup. Souvent l’action ne suit pas le discours : l’on a bien parlé, l’on croit que ça y est, c’est comme si c’était fait.

Et si l’on passe à l’action, il n’est pas rare que ce soit en tournant le dos à ce que l’on a promis.

Je pense notamment à la récente aventure de l’Aquarius, entre vaisseau fantôme et radeau de la Méduse.

Certes le nouveau gouvernement italien, au mépris du droit maritime, lui a interdit l’accès à ses côtes, et c’ est avec raison que le Président de la République Francaise le lui a reproché en termes sévères. Mais lui-même, malgré sa leçon de morale internationale, lui a fermé les ports qui dépendent de son pouvoir central et régalien, y compris ceux de la région Corse que les dirigeants élus de l’île ouvraient aux naufragés du droit d’asile. Et c’est avec justese que le chef du gouvernement italien lui a répondu vertement en reprochant à la France officielle sa position hypocrite, et j’y ajoute pour ma part : sa politique égoïste et inhumaine en matière d’accueil des réfugiés, une conduite illégale aussi à la frontière de Vintimille, conduite dénoncée par le ministre de l’intérieur italien.

La France qui dit si bien le droit et qui suit les chemins tortueux” écrivait le poète Léopold Sédar Senghor, Académicien français et Président de la République du Sénégal. L’on ne saurait mieux dire. Ayant bien reçu le verbe français, il le rend comme un boomerang à l’ancien colonisateur.

Dans l’odyssée de l’Aquarius, le nouveau gouvernement espagnol a fait un geste intelligent. On le dit intéressé, mais ce reproche me paraît minable dans la bouche de ceux qui n’ont pas voulu bouger. La motivation est affaire personnelle, elle ne regarde que soi, et le critique peut se tromper en prétendant la décrypter. Ce qui compte finalement, c’est ce que l’on fait ; le reste n’est que mauvaise littérature.

La France officielle aussi pouvait agir intelligemment ; elle s’est bornée à causer brillamment, comme souvent. Le pire est que, selon un sondage, les deux tiers des Français consultés ont approuvé l’inaction de leurs dirigeants. Et à toute occasion ces gens-là n’arrêtent pas de faire la morale au monde entier !

Sans « accueillir toute la misère du monde » comme disait Michel Rocard, la France pourrait faire beaucoup mieux pour le droit d’asile. Elle est loin d’une prétendue invasion. Et cependant ses dirigeants redoutent, non sans raison, les conséquences électorales d’une ouverture plus large.

Mais on ne combat pas la montée de l’extrême- droite en lui faisant des concessions : elle en voudra toujours davantage, comme en Italie et dans huit Etats de l’est.

En France aussi les idées xénophobes contaminent déjà largement l’opinion publique à droite, et même au-delà…

Toutefois le Président de la République a raison de dire que le problème des réfugiés ne peut pas être réglé par chaque Etat pour son propre compte, par ses seules forces, et que la solution ne saurait être que globale : elle nécessite une action solidaire au niveau de l’Europe. Il a du mal à se faire entendre par ses collègues. Mais là aussi la France officielle devra passer du bien dire au bien faire en mettant la pression sur les autres Etats, et d’abord en leur donnant le bon exemple. Il lui faudra pour cela beaucoup de détermination et de fermeté. Elle n’en manque pas quand elle est vraiment motivée, par exemple pour faire la police en Afrique francophone, en Irak, voire en Syrie…

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Une réflexion sur « Le pays du bien dire »

  1. Tout à fait M. Davant! Et un documentaire qui vient de passer à l’Atalante en présence du capitaine et cofondateur de l’Aquarius M. Klaus Vaugel, homme libre et déterminé : « Les Migrants ne savent pas nager », afin de voir la réalité bien en face, en espérant qu’au moins une partie des 2/3 des français victimes de cécité puissent entrouvrir les yeux…

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