Pour qui roule le train ?

Banderole contre la LGV à Bayonne.


La décision de l’Union européenne de participer au financement de la LGV en Aquitaine semble bien déconnectée des besoins réels en mobilités douces de la population et des effets délétères que cette ligne à grande vitesse ne manquera pas d’avoir sur les difficultés du territoire…pour gagner 25 minutes.

Alors que ces derniers mois ont été marqués par de fortes tensions autour de grands projets tels que les méga bassines de Sainte Soline, l’autoroute Toulouse- Castres ou la ligne Lyon-Turin, l’Union européenne va verser 60 millions d’euros pour le début des travaux des tronçons Bordeaux- Dax et Toulouse du projet LGV. Un autre grand chantier dont l’inutilité, la démesure, ainsi que les coûts environnementaux et sociaux continueront d’alimenter ici l’opposition déterminée des habitants. Nous sommes bien d’accord sur la nécessité d’investir dans le ferroviaire – et en masse – mais là, s’affrontent 2 visions différentes portant sur les priorités et l’usage même du train. Car au vu des moyens nécessités par les différents chantiers en présence, le fameux « en même temps » ne marche pas : on ne peut pas sérieusement rénover les lignes existantes tout en se lançant dans un chantier de plusieurs milliards d’euros de voies nouvelles LGV. Cela pose donc la question de savoir pour qui doivent être pensées les politiques ferroviaires et au service de quel mode de vie ?

Commencer par démocratiser l’usage du train

En ce début de vacances d’été 2023, alors que les conséquences du changement climatique font à nouveau la Une de l’actualité ; les voyages en avion, bien que 30 fois plus polluants en moyenne, reviennent trop souvent moins chers que les trajets en train. Ainsi, lorsque l’on achète un billet de train, on paye dans l’hexagone le droit de péage le plus cher d’Europe, plus la TVA et l’électricité taxée, le tout représentant 50% du prix du billet. Par contre, le kérosène des avions n’est toujours pas taxé, même sur les vols intérieurs…

Tout l’enjeu du train se situe pourtant ici. À quoi bon développer de nouvelles infrastructures si c’est pour que seule une minorité de la population en bénéficie ? Si l’on veut démocratiser et généraliser son usage comme l’exige le défi climatique, le train doit être en pratique un moyen de transport économique (financé par exemple par des taxes sur les modes de transports les plus polluants) et accessible au plus grand nombre.

L’Allemagne l’a bien compris : depuis le 1er mai, son D-Ticket à 49€ par mois permet d’utiliser l’équivalent des intercités de façon illimitée. L’Espagne aussi qui, depuis septembre dernier, donne accès à tous ses RER et TER gratuitement, augmentant ainsi jusqu’à 2,1 millions le nombre d’abonnés sur le seul premier trimestre 2023. Tandis que la politique tarifaire de la SNCF, obéissant à une seule règle de rentabilité immédiate, sacrifie la logique de service public à celle de la loi du marché.

Au-delà du prix du train, c’est l’offre du réseau elle-même qui doit être questionnée. La formule TGV n’a pas pour finalité de populariser l’usage du train et la question se pose de savoir si le développement des LGV doit constituer une priorité.

Distinguer les besoins nécessaires des désirs superflus

Un article de The Economist analysait cette frénésie française pour le tout TGV au moment où les petites lignes du quotidien sont supprimées. Selon le journal anglais, cette politique a pour conséquence d’aggraver la fracture d’« une France à deux vitesses » symbolisée par la crise des gilets jaunes. D’un côté des villes hyper connectées et des citadins jouissant de toujours plus de mobilité leur permettant de vivre toujours plus loin de leur lieu de travail. De l’autre, des villes et des territoires abandonnés au tout voiture. Un plan d’aménagement ferroviaire au XXIe siècle ne devrait pas se résumer à rejoindre Paris en un temps record.

Le prix à payer

Mais les sacrifices écologiques et les conséquences sociales pour les habitants qu’implique ce chantier visant à « gagner » une vingtaine de minutes semblent bien cher payés. Déjà évoquée dans les colonnes d’Enbata, la situation du logement est assez critique au Pays Basque et sur le reste de l’Atlantique sans que l’on ait besoin d’un tel projet.

A ce prix écologique et social s’ajoute le coût financier des opérations qui prévoit que 40% soit payé par les Collectivités Territoriales et les contribuables. On comprend pourquoi au 23 juin dernier, 628 élus locaux avaient déjà signé l’appel d’Irun plaidant la modernisation des voies ferroviaires existantes.

Certains de nos anciens devraient faire preuve de plus de sagesse au moment de porter de tels projets ambitieux et s’inscrivant dans la durée. Faute de quoi, l’obstination dans ces grands chantiers déconnectés des réalités et défis actuels et à venir risque fort d’amener à de vifs conflits. Et dès lors, les mouvements et associations abertzale et écologistes qui s’y opposent se verront-ils réserver demain le même sort que les Soulèvements de la Terre ?

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