Sous le regard gourmand de Poutine

Biélorussie

L’Édito du mensuel Enbata

Dans ce monde de chaos sociaux, climatiques, sanitaires et institutionnels, la révolte démocratique du peuple Biélorusse agit comme une bouffée d’air pur.

Refusant la mascarade frauduleuse de l’élection présidentielle du 9 août au profit du dernier dictateur d’Europe, c’est une population toute entière qui, pacifiquement, met un arrêt à 26 ans de pouvoir absolu hérité de l’implosion de l’Union Soviétique. La répression habituelle qu’exerçait Alexandre Loukachenko n’intimide plus. A ses derniers gestes de matamore aux abois, kalashnikov en main et tenue de combat, le prix Nobel de littérature, Svetlana Alexievitch, a répondu en se rendant à la convocation de la police fleurs dans les bras. Plusieurs manifestations à la catalane, de centaines de milliers de personnes occupent places et rues de la capitale Minsk et des principales villes du pays, arborant l’ancien drapeau national proscrit par le régime.

Comme l’ensemble du peuple, l’opposante de 37 ans que le dictateur a officiellement battue dans les urnes présidentielles, Svetlana Tikhanovskaïa, réfugiée en Lituanie, ne revendique pas le pouvoir qui lui a été volé mais appelle au dialogue national pour organiser de nouvelles élections. Contrairement à l’Ukraine, où la révolte du Maïdan, en 2014, s’est faite contre l’hégémonie russe et le rapprochement avec l’Europe, ici il n’y a pas de sentiment anti-Russe. On aspire cependant à la non-ingérence de Poutine et on communique avec le Parlement Européen.

Poutine toutefois, déclare : “nous avons des obligations avec la Biélorussie, ce pays est le plus proche de nous ethniquement, linguistiquement, culturellement et spirituellement. Ce qui se passe là-bas ne nous est pas indifférent.” Et de préciser : “À la demande de Loukachenko, une réserve d’agents des forces de l’ordre est prête à intervenir.” Si nous ne sommes pas dans le modèle ukrainien, on redoute cependant que les fameux combattants russes sans uniforme, peuvent répéter l’opération militaire toujours active dans le Donbass. Si ce soulèvement démocratique, dont l’objectif n’est pas un coup d’Etat mais l’organisation d’élections libres, ne capitalise pas rapidement, il s’essoufflera et se radicalisera. Dès lors, d’affaire interne, il deviendra enjeu géopolitique.

Longtemps intégrée à l’Union Soviétique, la petite Biélorussie de moins de 10 millions d’habitants échappera difficilement à l’attraction de l’immense Russie de Poutine. Soit par la création d’une néo-fédération post-communiste, soit par la construction d’un glacis russe s’étendant de la Géorgie aux Pays du Caucase et à la Crimée. On perçoit ici la difficulté pour un peuple, même indépendant nationalement, d’échapper aux tensions internationales et aux zones d’influences des grandes puissances voisines toujours avides de tirer profit d’un État en crise. Dans la proximité de la Biélorussie, des États comparables, eux aussi anciennes républiques d’URSS, ont su heureusement sécuriser leur indépendance retrouvée. Lituanie, Estonie et Lettonie, en adhérant à l’Union Européenne, ont su se mettre à l’abri de l’historique hégémonie de la “grande Russie”, tsariste ou communiste. Ce n’est pas là la moindre originalité de la construction européenne où des États souverains s’associent librement et bâtissent démocratiquement un État de droit et une charte de respect mutuel. Les liens constitutifs entre partenaires découlent non pas de lois mais de traités, c’est-à-dire de pactes entre États.

On entre dans l’UE par un vote démocratique, souvent un referendum. On peut en sortir de la même manière, voir le Brexit. Ce système politique est le parfait contraire du rapport de force encore pratiqué il y a peu sur ce continent, lors de la guerre des Balkans où l’impérialisme serbe ensanglanta l’ancienne Yougoslavie jusqu’au génocide musulman de Srebrenica. L’adhésion à l’UE de la Slovénie et de la Croatie, anciennement yougoslaves, sont aujourd’hui leur meilleure assurance-vie nationale. Les autres composantes de l’Empire de Tito, Macédoine, Bosnie, Kosovo et Serbie, tout comme l’Albanie savent désormais que la paix aux Balkans n’est plus une fatalité. Ils sont tous impatients dans le sas d’entrée de l’Union Européenne. Mais avant de poursuivre son élargissement, celle-ci doit harmoniser ses règles internes pour que le vouloir entrer en Europe soit prolongé par le vouloir vivre en Europe.

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