Indépendance stratégique

L’Édito du mensuel Enbata

D’abord le Covid. Et puis la guerre en Ukraine. Dans le sillage de ces deux évènements mondiaux majeurs, l’Europe et toutes les nations du monde n’auront jamais autant questionné leur propre souveraineté. Si cela pourrait réjouir les abertzale qui en espèrent des dividendes, ou les militants du climat, qui croient deviner l’avènement d’une transition énergétique, l’avenir n’est sans doute pas aussi évident.

Et voilà que Colonna se fait assassiner dans une prison où il n’aurait pas dû être et que le gouvernement français propose l’autonomie pour calmer les esprits. Le bien le plus précieux du moment.

S’il n’y avait cette première fausse note : non seulement personne ne croit qu’à quelques jours d’une échéance électorale, le ministre français de l’intérieur puisse tenir parole, mais on se doute en prime qu’il n’en a pas l’intention, maintenant que la Constitutionnaliste Wanda Mastor en a tracé la route. L’auteure d’un rapport juridique sur l’évolution institutionnelle de l’île, commandé par le président du conseil exécutif de la collectivité de Corse, Gilles Simeoni, prévient déjà : “il faut prendre garde à distinguer l’autonomie d’une “certaine” autonomie qui renvoie, en réalité, à un certain degré de décentralisation.

La seconde erreur de ce gouvernement, est la levée en un claquement de doigts du statut de Détenu particulièrement signalé (DPS). Pour Yvan Colonna d’abord, en précisant que la loi le permettait lorsqu’un pronostic vital était engagé. Puis pour les détenus corses, Pierre Alessandri et Alain Ferrandi, leur permettant ainsi de purger leurs peines sur l’ île. Abrité derrière “l’indépendance” de la justice, le gouvernement français a coutume de justifier ainsi le traitement particulier infligé aux prisonniers basques et se fait prendre la main dans le pot de confiture en montrant qu’à situation exceptionnelle, la politique est souveraine.

Pas de quoi calmer les Artisans de la paix qui demandent, de plus en plus fermement, la fin du régime d’exception pour les prisonniers basques. Ni les peuples sans Etat qui aspirent à l’autonomie et à la reconnaissance lorsqu’Emmanuel Macron appelle à “l’indépendance stratégique” de la France. Le président évoquait d’abord l’indépendance économique, lorsque la crise sanitaire a mis en exergue l’interconnexion mondiale des routes de production et la dépendance cruelle du moindre tube de paracétamol. Aujourd’hui “l’indépendance stratégique” est une volonté d’autonomie énergétique, à la faveur de la hausse brutale des énergies fossiles. Si on peut s’étonner de constater une telle dépendance au gaz russe et au pétrole en Europe, 45 ans après un fameux discours du président américain Jimmy Carter pour la “transition énergétique”, il y a peu de chance que la crise constitue un sursaut mondial. Jimmy Carter, de fait, ne parlait pas tant de panneaux solaires que de souveraineté et a lancé un vaste plan d’extraction de charbon. Quant à l’Europe, une fois bue la honte d’avoir expliqué aux Ukrainiens que nous continuons à financer les bombes qui les tuent pour ne pas risquer d’avoir froid l’hiver prochain, l’indépendance stratégique risque vite de glisser d’une vision économique à une politique de défense.

Le choc pétrolier de 1973 était aussi accompagné des mots d’aujourd’hui, pour trouver alternatives, économies, transitions, vertus, écologie et indépendance. Il a été suivi d’extraction de charbon et d’innovations dans la fracturation hydraulique, l’exploitation offshore ou celle des schistes bitumeux. Le monde d’après Covid, que l’on imaginait plus vertueux, ne se dessine toujours pas. La crise énergétique d’aujourd’hui, qui préfigure pourtant idéalement les difficultés que le dérèglement climatique nous promet, ne nous permettra pas de l’anticiper.

“L’indépendance stratégique” est une géométrie variable, comme la souveraineté ou l’autonomie corse, mais reste une opportunité d’échelle ou de territoire. C’est en tout cas une réflexion qui tombe sous le sens de l’Aberri eguna du 17 avril prochain à Ascain.

Indépendance

Soutenez Enbata !

Indépendant, sans pub, en accès libre, financé par ses lecteurs
Faites un don à Enbata.info ou abonnez-vous au mensuel papier

Enbata.info est un webdomadaire d’actualité abertzale et progressiste, qui accompagne et complète la revue papier et mensuelle Enbata, plus axée sur la réflexion, le débat, l’approfondissement de certains sujets.
Les temps sont difficiles, et nous savons que tout le monde n’a pas la possibilité de payer pour de l’information. Mais nous sommes financés par les dons de nos lectrices et lecteurs, et les abonnements au mensuel papier : nous dépendons de la générosité de celles et ceux qui peuvent se le permettre.
« Les choses sans prix ont souvent une grande valeur » Mixel Berhocoirigoin
Cette aide est vitale. Grâce à votre soutien, nous continuerons à proposer les articles d'Enbata.Info en libre accès et gratuits, afin que des milliers de personnes puissent continuer à les lire chaque semaine, pour faire ainsi avancer la cause abertzale et l’ancrer dans une perspective résolument progressiste, ouverte et solidaire des autres peuples et territoires.
Chaque don a de l’importance, même si vous ne pouvez donner que quelques euros. Quel que soit son montant, votre soutien est essentiel pour nous permettre de continuer notre mission.
Faites un don ou abonnez vous à Enbata : www.enbata.info/articles/soutenez-enbata

  • Par chèque à l’ordre d’Enbata, adressé à Enbata, 3 rue des Cordeliers, 64 100 Bayonne
  • Par virement en eusko sur le compte Enbata 944930672 depuis votre compte eusko (euskalmoneta.org)
  • Par carte bancaire via système sécurisé de paiement en ligne : paypal.me/EnbataInfo
  • Par la mise en place d’un prélèvement automatique en euro/eusko : contactez-nous sur [email protected]

Pour tout soutien de 50€/eusko ou plus, vous pourrez recevoir ou offrir un abonnement annuel d'Enbata à l'adresse postale indiquée. Milesker.

Si vous êtes imposable, votre don bénéficiera d’une déduction fiscale (un don de 50 euros / eusko ne vous en coûtera que 17).

Enbata sustengatu !

Independentea, publizitaterik gabekoa, sarbide irekia, bere irakurleek diruztatua
Enbata.Info-ri emaitza bat egin edo harpidetu zaitezte hilabetekariari

Enbata.info aktualitate abertzale eta progresista aipatzen duen web astekaria da, hilabatero argitaratzen den paperezko Enbata-ren bertsioa segitzen eta osatzen duena, azken hau hausnarketara, eztabaidara eta zenbait gairen azterketa sakonera bideratuagoa delarik.
Garai gogorrak dira, eta badakigu denek ez dutela informazioa ordaintzeko ahalik. Baina irakurleen emaitzek eta paperezko hilabetekariaren harpidetzek finantzatzen gaituzte: ordaindu dezaketenen eskuzabaltasunaren menpe gaude.
«Preziorik gabeko gauzek, usu, balio handia dute» Mixel Berhocoirigoin
Laguntza hau ezinbestekoa zaigu. Zuen sustenguari esker, Enbata.Info artikuluak sarbide librean eta urririk eskaintzen segituko dugu, milaka lagunek astero irakurtzen segi dezaten, hola erronka abertzalea aitzinarazteko eta ikuspegi argiki aurrerakoi, ireki eta beste herri eta lurraldeekiko solidario batean ainguratuz.
Emaitza oro garrantzitsua da, nahiz eta euro/eusko guti batzuk eman. Zenbatekoa edozein heinekoa izanik ere, zure laguntza ezinbestekoa zaigu gure eginkizuna segitzeko.
Enbatari emaitza bat egin edo harpidetu: https://eu.enbata.info/artikuluak/soutenez-enbata

  • Enbataren izenean den txekea “Enbata, Cordeliers-en karrika 3., 64 100 Baiona“ helbidera igorriz.
  • Eusko transferentzia eginez Enbataren 944930672 kontuan zure eusko kontutik (euskalmoneta.org-en)
  • Banku-txartelaren bidez, lineako ordainketa sistema seguruaren bidez: paypal.me/EnbataInfo
  • Euro/euskotan kenketa automatikoa plantan emanez: gurekin harremanetan sartuz [email protected] helbidean

50€/eusko edo gehiagoko edozein sustengurentzat, Enbataren urteko harpidetza lortzen edo eskaintzen ahalko duzu zehaztuko duzun posta helbidean. Milesker.
Zergapean bazira, zure emaitzak zerga beherapena ekarriko dizu (50 euro / eusko-ko emaitzak, 17 baizik ez zaizu gostako).